lundi 6 juillet 2009

un appareil éléctroménager

L'été peut devenir étouffant en Ecosse. Puis un orage vient crever la poche de chaleur. Mais le ciel n'a pas grondé depuis deux semaines. Alors on reste au frais de nos mansardes, on se lève tôt, on fait la sieste.
Cette torpeur est difficile pour les travaux de longue haleine mais propice aux saillis, aux aphorismes, aux pensées développées en quelques phrases.
Ce matin, devant mon bol de thé, je me suis fait la réflexion que dans la grande querelle des sexes, il y a une instrumentalisation de l'autre. Ainsi j'ai souvent constaté que les femmes considèrent l'homme comme un appareil électroménager multifonction. Il faut qu'il fasse ça, qu'il fasse ci, qu'il soit protecteur, viril, mais pas macho, doux et fort. La liste serait longue. On ne s'interroge pas assez sur toutes les fonctions que l'on s'estime en droit de trouver chez l'autre (homme ou femme). Il y a une attitude de consommateur exigeant dans ce rapport à l'autre.

mardi 12 mai 2009

L'écosse ou comment j'ai pris goût à l'ennui

L'ennui a mauvaise réputation. C'est dommage. C'est dans l'ennui que l'on prend le temps de penser et d'observer. L'ennui est le prélude à la naissance des belles idées et des grands découvertes. J'ai fait une marche d'une heure ce matin après mon petit déjeuner. Il y a un sentier qui passe devant mon petit manoir et qui va jusqu'à la rivière. Quand on a traversé la rivière (sur un pont de bois dont l'état m'inquiète un peu), on entre dans une charmante forêt de chênes. C'est idéal pour s'abriter dès que le soleil devient trop fort (chose qui arrive rarement il faut bien le dire) ou quand la chaleur devient étouffante (ce n'est pas rare en été).
J'avais emporté un thermos de thé et un recueil de poèmes. Ce fut parfait.
Une question revient souvent de la part de mes correspondants (toutes mes soirées sont consacrées à répondre à des gens qui m'écrivent du monde entier) : "Si je sors avec cette femme, cela m'empêche d'aimer une autre femme qui peut-être sera un peu différente, un peu plus ceci, un peu moins cela... Ne dois-je pas être patient et attendre la femme parfaite ?"
Nous sommes tous passés par là. Cette question est normale. S'engager dans une histoire d'amour c'est commencer à construire une aventure à deux qui doit durer des années, et pour les plus chanceux, toute une vie. Il ne s'agit pas de choisir une femme qui nous plaira dans sa jeunesse. C'est un peu facile, les femmes sont magnifiques à ces âges là. Il s'agit de choisir une femme qui a assez de vie et de curiosité en elle pour continuer à nous intéresser quand les rides seront apparues.
Mais revenons à la question de mon correspondant. Est-ce sage d'attendre ? Sans doute oui. Beaucoup d'histoires se vivent mal et se terminent parce que l'on s'est précipité.
Pourtant attendre et repousser sans cesse toutes les femmes qui nous plaisent sous le prétexte qu'elles ne sont pas encore parfaites, constitue un symptôme psychologique sur lequel il faudrait se pencher.
Si une femme vous plaît, si elle est intelligente et drôle, si elle a de la personnalité, si elle est généreuse et gentille, si vous aimez être en sa compagnie, arrêtez de vous poser des questions, sortez avec elle. Les atermoiements sont une résistance qui risque de vous faire passer à côté de la femme de votre vie.
A un moment il est nécessaire de choisir. Il n'y a pas de rayon magique qui va surgir du ciel pour désigner celle que vous devez aimer. Non. C'est à vous d'agir, et d'abord d'agir sur vous même.

Pr Bada-Bing

vendredi 24 avril 2009

paradoxe

Mes voisins sont des gens charmants. Souvent ils m'invitent à manger quelque chose (je n'ai pas encore reconnu l'animal servi, à moins que cela soit du choux) toutes les semaines. C'est un beau couple, un couple qui a vieilli. Rien n'est plus beau au monde que ces couples qui durent, qui ont dépassé la passion, pour autre chose, une invention personnelle. Ces couples sont semblables aux bouilleurs de cru, qui produisent leur propre eau de vie, modestement, discrètement. Ils ont une recette, mais ils ne sauraient exactement la décrire. Elle tient à ce qu'ils sont, à de microscopiques inflexions, à des infinités d'attention sans éclat.
J'espère vivre cela un jour.
Pour l'instant, je me trouve à une époque de ma vie où j'aime mon célibat. Je suis heureux ainsi, équilibré et de bonne compagnie. Paradoxalement cet état ferait de moi un bon compagnon amoureux. Mais pourquoi choisirais-je le couple, alors que je mène une vie heureuse et satisfaisante ? Il me semble que l'on ne commence une histoire avec quelqu'un que lorsque l'on ne va pas très bien. On espère dans l'amour trouver l'apaisement, la douceur, le sens que l'on a pas, que l'on ne trouve pas seul. Nous aimons quand nous allons mal pour aller mieux, et trouver ce qui nous manque. Nos conflits intérieurs et notre mal-être rencontreront ceux de celle qui partage notre vie. C'est la raison de la complication des histoires d'amour. 
Un homme et une femme devraient sortir ensemble quand ils vont bien. Mais alors s'ils vont bien, pourquoi diable commenceraient-ils une relation ? Ils n'en ont pas besoin, pire : ils n'en ont pas spécialement envie. Il faudra attendre l'angoisse, la déprime, la peur.
L'amour est tout entier prisonnier de ce paradoxe.


Professeur Bada-Bing

mercredi 8 avril 2009

les conseils amicaux

Ce matin la brume recouvre les highlands. Je me suis installé au bord d'une des nombreuses rivières qui dévalent et irriguent la région. Je pêche le saumon avec une prodigieuse absence de succès. Mais ce temps de contemplation et de concentration est propice à mes recherches. Le cadre est idéal. L'eau fracasse les rochers, les pics verts et les mésanges chantent, l'air est frais, la lumière claire. Rien de tel que le début du printemps en terre écossaise.
Aujourd'hui je vais parler de ces amis qui nous conseillent quand nous sommes amoureux d'une femme.
Les amis ont un avis. Ils savent très bien comment vous devez agir. En général, moins ils sont psychologues et plus ils s'essayent à l'analyse et à la prospective psychologique, comme des manchots donnant des leçons de vol à un aigle convalescent.
On vous dira mille choses, on développera des théories. Aucun de vos amis ne sera d'accord et rapidement vous vous retrouvez au milieu d'un faisceau de recommandations contradictoires : l'appeler, ne pas l'appeler, lui toucher le visage, le dos, la taille, le plexus solaire, ne surtout pas la toucher, l'inviter au restaurant, partager le montant de l'addition.
La vérité est que tout le monde est perdu. Nous donnons les conseils qui nous semblent logiques, ceux qui ont permis notre relation avec telle femme. De notre expérience nous développons une théorie. C'est une erreur. Les femmes ne sont pas compréhensibles dans un système oeclidien. Acquérir des bases en mécaniques quantiques est la meilleur chose à faire. Tout en sachant (comme dans le cas archétype du chat de Schrödinger : si le chat est mort et vivant, de même une femme pourra vous aimer et ne pas vous aimer, souhaiter que vous l'embrassiez tout en vous repoussant si vous tentez de le faire, ne pas vous appeler alors qu'elle a envie de vous parler).
Il faut se faire une raison. Pour savoir si la femme que vous aimez et que vous fréquentez depuis quelques temps partage vos sentiments, un accélérateur de particules serait nécessaire et toute une équipe de chercheurs (dont un ou deux prix Nobel). Cela n'est pas envisageable. 
La compréhension des femmes n'est pas affaire d'intuition, ce n'est pas un art, aucun progrès n'est possible, aucune certitude n'est acquise.
Pour comprendre les femmes, il n'y a qu'une seule voie : il faut se comporter comme si on les comprenait. A partir de ce moment, magiquement, leur comportement à votre égard s'éclaire et cesse d'être érratique. 
Et si on désire les séduire : comme si on les comprenait mieux qu'elles-mêmes. 
 
Il faut dire un mot de ces amis qui vous présentent à une femme. Ils arrangent des coups (des couples), s'imaginent marieurs. Plusieurs remarques sont à faire à propos de ce comportement.
- un ami vous présente cette femme dont il vous a fait un portrait idyllique, car il est lui-même attiré par elle : il vivra l'histoire par procuration. Souvent vous remarquerez qu'il s'estimera même propriétaire de cet amour qu'il a initié. Il a arrangé cette rencontre pour éviter de tromper sa femme. Vous êtes le remplaçant.
- On présente quelqu'un à nos amis car l'on veut qu'ils cessent d'être célibataires. Leur liberté est un spectacle insoutenable. Leur célibat doit cesser car il nous fait regretter cette époque bénie. 
- Ce cas de figure est le moyen infaillible de connaître l'image que vos amis ont de vous. Le genre de femmes qu'ils croient vous correspondre vous révélera l'effroyable distance qui existe entre l'image que vous avez de vous-même et celle qu'ils ont de vous. c'est très souvent vexant. Si vous êtes un artiste, il y a toutes les chances pour que vos amis tiennent à vous présenter une femme hystérique, dépressive, qui fume trois paquets de cigarettes par jour, boit un demi-litre de whisky.  

La vérité est que les choses se font souterrainement. Dans la plupart des cas, nous nous retrouvons avec quelqu'un moins parce que nous l'avons voulu (ou qu'elle l'a voulu) que parce des éléments, comme des aimants et des pièces métalliques, ont fomenté notre attirance. Nous construisons une fable dans laquelle nous croyons que nous avons fait un choix, élaboré des stratégies et des tactiques de séduction. En fait, les jeux étaient faits. En amour, nous sommes comme ces enfants assis à côté de leur père dans la voiture, équipés d'un volant en plastique, mimant la conduite, tournant quand nous sentons la voiture tourner, appuyant sur une pédale imaginaire quand nous voulons freiner.

(à suivre, un saumon pointe ou bien est-ce une baleine?)

samedi 7 mars 2009

Comment savoir si une femme vous aime ?

L'erreur classique consiste à interpréter ce que nous pensons être des signes. Dans la plupart des cas, les signes ne sont qu'une manière d'être féminine. Si vous essayez d'embrasser une femme en vous référant à ces signes, celle-ci sera légitimement surprise par vos manières.
Voici la liste des signes les plus classiques qui laissent penser, à tort, aux hommes qu'une femme les aime.
1. Elle vous dit :"Tu es l'homme de ma vie."
Il serait bien imprudent de confondre cela avec une déclaration d'amour. Etre l'homme de la vie d'une femme peut très bien signifier être son meilleur ami, l'homme qu'elle ne perdra jamais, sur qui elle pourra toujours compter, qui ne la trahira pas. Ce sont des qualités qui font défaut aux hommes dont elle est amoureuse. Vous leur êtes supérieur : vous jouez le rôle de l'idéal qui ne doit pas s'incarner pour ne pas décevoir. Si elle était amoureuse de vous, elle prendrait le risque de vous perdre. Et elle tient bien trop à vous pour ça.
2. Depuis quelques temps, quand vous vous voyez, elle porte du rouge à lèvres, se parfume, met des décolletés renversant.
Ne rêvez pas. C'est sans doute tout à fait ingénu. Si elle est si sexy en votre présence, c'est qu'elle se sent en confiance. Elle ne vous voit pas comme un homme désirant. Elle est persuadée que vous n'aurez pas de pensées lubriques. Elle peut se sentir "femme" sans danger. 
3. Elle aime vous faire des câlins. Elle se presse contre vous et met sa tête dans le creux de votre épaule.
Cela se confirme. Vous êtes son gros nounours. Elle peut aussi vous proposer de dormir chez elle, ou même avec elle. Si elle n'hésite pas à se déshabiller, à se montrer en sous-vêtements, à vous convier aux soldes dans les magasins de lingerie, c'est alors terminé pour vous : vous êtes le meilleur ami homosexuel (mais vous n'êtes pas homosexuel) ou asexué (mais comme n'importe quel homme, il est évident que vous éprouvez facilement du désir quand une femme se colle à vous). Certaines femmes ont une grande capacité à oublier la différence des sexes.
4. Elle vous dit "Je t'aime".
Le registre sémantique est trompeur. Dans son esprit c'est évident : elle vous aime comme un ami, comme son meilleur ami. Comment avez-vous pu croire autre chose ?
5. "Tu n'es pas comme les autres, toi tu es un mec bien, tu es génial."
C'est définitivement fini. Vous n'avez plus aucune chance de conquérir son coeur, car elle tombe justement amoureuse des "autres". Pour l'honnête homme, la tentation existe alors de prendre exemple sur les "autres". C'est en général payant. Mais cela signifie perdre sa place d'homme idéal. Un pessimiste dirait qu'il semble falloir faire un choix entre avoir l'estime de cette femme et avoir son amour. Le scientifique que je suis remarque qu'il ne faudrait pas généraliser et changer son comportement en prenant pour excuse ce type de fonctionnement névrotique.
6. Elle est jalouse quand elle vous voit proche d'autres filles.
Il faut vous faire à cette idée : on n'a pas besoin d'être amoureux pour être jaloux. Si elle ne veut pas qu'une femme vous aime ce n'est pas parce qu'elle-même vous aime. C'est qu'elle ne supporte pas que cette autre femme ai pu penser qu'elle aurait la préférence de votre amour (qu'elle ne pense d'ailleurs pas envisageable). 
(ou pour tourner ça autrement : si elle n'est pas amoureuse de vous, elle ne voit pas au nom de quoi une autre femme se permettrait de l'être et de lui prendre la place qu'elle aurait pu vouloir avoir ; d'ailleurs elle vous le dira : cette fille n'est pas assez bien pour vous, elle vous verrait plus avec quelqu'un d'exactement comme elle mais pas elle puisque vous êtes amis) 
Les femmes ne sont pas compliquées, elles sont complexes.
Alors me direz-vous, quand sait-on qu'une femme nous aime ?
C'est terrible à dire, mais on ne le sait pas avant d'avoir fait le premier pas. C'est à nous que revient la charge du début de la relation amoureuse. Avec le risque de nous faire éconduire. 
La plupart du temps une femme qui aime un homme ne fera rien de spécial pour lui montrer. Parce que sa plus grande peur serait qu'il comprenne qu'elle l'aime. Si une femme a l'impression qu'elle a montré à un homme qu'elle l'aimait, elle sera persuadée que c'est la raison pour laquelle il ne l'aimera pas.
Si une femme est indifférente, si elle ne vous rappelle pas, si elle oublie votre prénom, si elle ne rit pas à vos blagues, si elle lève les yeux au ciel quand vous dites quelque chose, alors il y a de grandes chances pour qu'elle soit en train de tomber amoureuse.  
Je ne voudrais pas oublier le rôle des hommes dans cette histoire.
Il faut noter que la vertigineuse faiblesse psychologique des hommes ne favorise pas les choses. Pire encore : la connaissance par les femmes de l'absence de psychologie des hommes les conduit sans doute à ne rien entreprendre.
L'amour (ses ambiguïtés, ses difficultés) entre hommes et femmes est le résultat de la rencontre entre un manque total de psychologie et un excès invraisemblable de psychologie.
Le soleil se couche sur les Highlands. Il est temps pour moi de préparer un bon morceau de venison. Je pense le faire en ragoût.  

Pr Bada Bing

présentation

Bonjour,
En guise de présentation. 
J'en suis désolé, mais je me dois de garder mon identité secrète. En effet, j'ai été (et je le suis encore, sentimentalement, intellectuellement parlant) psychanalyste. Aussi je ne voudrais pas que d'anciens patients me reconnaissent et retrouvent dans mon journal de bord des exemples inspirés de nos séances. Vous pouvez correspondre avec moi en m'appelant docteur Bing-Bong (bruit de l'inspiration qui tombe sur un homme portant un casque en métal).
J'ai arrêté toute pratique clinique en hôpital et à mon cabinet pour me consacrer à l'étude de la femme. J'ai pris cette décision le jour où je me suis aperçu, en lisant mon agenda, que j'avais prévu de me marier avec huit de mes patientes le même jour de juin. 
Cette étourderie (et le fait d'avoir choisi une période si conventionnelle) m'a mis la puce à l'oreille. J'ai compris qu'il était nécessaire de prendre de la distance. 
Je me suis donc installé dans un charmant petit manoir dans le nord de l'Ecosse. La campagne y est verte, le calme total, les rivières claires et les cours de cornemuses très abordables. Je suis assez isolé pour mener à bien mes recherches et réfléchir. 
Jour après jour, ma vie d'ermite scientifique me permet de dessiner une projection de Mercator de la femme, un globe de Coronelli de la féminité. Ce travail est le legs que je fais aux générations futures.
Nous ne comprenons pas les femmes, nous interprétons mal ce qu'elles disent (ou ne disent pas), font (ou ne font pas).  Nous aimons leur fréquentation, mais nous sommes bien souvent embarrassés par leurs questions et leur comportement. Dans la majorité des cas, nous faisons le choix de nous taire et de hocher la tête. C'est une parade efficace, éprouvée depuis des millénaires. Mais il me semble qu'il est temps d'affronter les questions véritables. Vous verrez, ce n'est pas si compliqué. Si on se donne les moyens, les femmes ne sont pas incompréhensibles.
Commençons.
Pr Bada Bing